Ergonomie pour les maraîcher(e)s

Voici quelques lectures et vidéos pour démarrer votre travail concernant l’ergonomie. Pour ce qui concerne la formation, nous serons beaucoup plus proches du corps et de la discussion, mais pour l’heure je vous laisse avec un petit repas dont le menu se trouve ici… Un petit clic et ça s’ouvre. A bientôt !

Menu de notre première discussion sur l'ergonomie

Mise en bouche : Quand la facilité va avec l'efficacité

Voici une courte vidéo, où l’on voit Adam Porro démontrer que si l’on s’y prend bien, il n’y a besoin d’aucun effort pour passer de la position assise par terre à debout. Cette façon de changer de position ressemble à ce que font les jeunes enfants, à la différence que le mouvement est épuré. Adam Porro est certes un expert du mouvement, il a beaucoup travaillé sur ses possibilités de se mouvoir librement… mais vous pouvez très probablement réaliser ce qu’il fait. Les ingrédients en sont : chercher où poser ses appuis, laisser les articulations libres de s’adapter, laisser le bassin se déplacer sans effort.

Une question plus générale qui se pose est la suivante : pourquoi certains passages nous semblent-ils difficiles ? Pourquoi avons-nous l’impression qu’il sera forcément coûteux en efforts de passer du sol à la position debout ? Nous proposons un point de vue : c’est avant tout une question de croyance, qui vient de l’habitude que c’est difficile sur les chemins que l’on connaît, puisqu’on a oublié ceux qui étaient faciles. Or quand on trouve comment le faire facilement, ces deux extrêmes se rapprochent au fur et à mesure que l’on va plus librement où on le souhaite. Alors, notre perception du monde change (rien que ça !).

A vous de jouer ! Patiemment, comment ferez-vous pour fluidifier tout le trajet ? Comme les maraîchers ont souvent à aller au sol, nous pourrons explorer ensemble comment diminuer (de manière importante) l’énergie pour le faire.

Une discussion sur l'ergonomie pour les professions physiques

Ici nous allons passer en revue un certain nombre de questions qui se posent aux personnes qui travaillent avec leur corps de manière intensive.

Tout est corporel

Pour situer les choses, rappelons que toutes nos actions passent par notre corps : que ce soit le musicien, le mâçon, la secrétaire ou le comédien, tout ce qui a une action sur le monde est passé par nos mains, nos pieds, notre peau, nos sens, nos muscles, etc. Par conséquent, pour que l’action soit satisfaisante, on peut poser la question suivante : « Comment faire pour que notre intention soit harmonieusement liée avec notre action ? »

L’inverse serait de décider dans sa tête qu’il faudrait pouvoir faire comme-ci ou comme-ça, sans vérifier sincèrement si c’est possible, facile, agréable…

A l’impossible nul n’est tenu

Une fois ceci posé, on peut commencer par repérer où l’on essaie de faire l’impossible. En effet, même si notre organisme est formidable, on ne peut pas soulever 100 kg à bout de bras et on ne peut pas promener 10 tonnes par jour sans assistance. Parfois, quelque chose en nous se déconnecte et on essaie de faire des choses impossibles, ou bien pas souhaitables pour notre santé.

Si on se laisse emmener sur cette pente, c’est le corps qui dira stop, la douleur nous permettant de sentir que quelque chose doit être réajusté.

Feignant intelligent

Que ce soit après une blessure — ou bien avant — nous préconisons d’aller vers l’efficacité et d’être économe. Ne nous y trompons pas, nous encourageons à réussir des choses exceptionnelles, mais contrairement à ceux qui aiment serrer les dents en criant « No Pain, No Gain » (pas d’amélioration sans douleur), nous cherchons l’aisance dans l’action.

Est-il autorisé de réussir à faire ce que l’on souhaite alors qu’on a gardé le sourire ? Nous posons la question ainsi car il semble que l’on récompense plus facilement quelqu’un qui peine que quelqu’un qui reste détendu et semble ne faire aucun effort. « Fais un effort ! » est une phrase que les gens se répètent comme on propage un rhume…

Alors nous proposons de rejoindre le club des feignants intelligents. Les autres diront que nous sommes feignants, nous dirons que nous sommes intelligents et les faits seront de notre côté car le travail accompli sera à la hauteur de la qualité dans nos gestes et leur enchaînement.

Le témoignage d’un tailleur de pierre

Nous ne prétendons pas faire le tour de l’ergonomie en quelques lignes, mais nous serions heureux de vous encourager à méditer sur ce thème. Pour être concret, nous sommes allés à la rencontre d’Eric Marandel, tailleur de pierre depuis 30 ans. On devine que la pierre est un maître implacable : si on n’y prend garde, le corps s’épuisera bien avant elle. Or nous avons rencontré quelqu’un qui a quelques difficultés, mais très modestes au regard du travail qu’il a accompli et des tonnes de pierres qu’il a taillées et placées.

Vous verrez dans cette vidéo quelques ingrédients très importants pour travailler longtemps en bonne santé :

  • quand ce n’est pas nécessaire, il ne soulève rien. Nous avons été admiratifs de sa façon de sentir la pierre en la faisant basculer sur une arête, là où nous aurions été tentés de la soulever « pour voir » ;
  • vous pourrez aussi admirer sa légèreté dans ses déplacements et dans le maniement de ses outils.

Pour le reste, laissons-lui la parole (vidéo de 4’37) :

Que faire, maintenant ?

C’est l’heure de prêcher pour sa paroisse : il y a de nombreuses options pour améliorer ses habitudes, mais Feldenkrais est une merveille dans ce domaine, c’est pourquoi nous l’utiliserons dans la formation. Pourquoi ? Tout simplement parce qu’on y apprend à prendre conscience de ce que l’on fait, comment on fait, comment on pourrait faire autrement ; c’est une qualité essentielle de notre cerveau, qui lui permet d’apprendre des choses extrêmement variées, des acrobaties aux milliers de langues dans le monde.

Ainsi, on peut travailler dans deux directions pour améliorer son aisance :

  • Poser de bonnes bases quant aux gestes que l’on va faire, aux outils que l’on utilise, à l’arrangement de ses actions : d’une certaine façon, ceci est l’environnement de l’action. On trouvera une réflexion sur ces thèmes dans toute bonne formation en ergonomie.
  • D’autre part, nous avons tout à gagner à prendre conscience de notre confort et naviguer parmi la foule de façons différentes de faire, pour choisir ce qui est léger et nous renforce : ici, c’est de nous qu’il s’agit, de notre façon de coordonner nos muscles, des plus gros aux plus petits. Cet aspect sera plus développé dans notre formation que dans des formations plus classiques.

Là où Feldenkrais et les pratiques cousines vont se distinguer, c’est dans la façon d’amener des gestes plus efficaces : au lieu de « donner la solution » de l’extérieur, on va stimuler nos capacités naturelles de sentir et d’ajuster nos mouvements. C’est ce qui nous a permis d’apprendre à marcher, à faire du vélo, à nager, à chanter, etc. Personne ne nous a dit les détails, c’est notre cerveau qui a trouvé en essayant. Nous défendons donc de guider vers l’autonomie, le maraîcher(e) est ensuite capable de chercher tout seul ou de vérifier ce qui lui convient ou pas.

Des points spécifiques au maraîchage

Le maraîchage est une activité dont la composante physique est évidente. De ce fait, il est indispensable de veiller à travailler dans la sécurité et l’aisance.

Dans ce court document, nous proposons de faire germer quelques idées pour améliorer ces aspects. Pour être plus précis, nous invitons le lecteur à repérer des ingrédients importants dans les tâches du maraîchage.

Par exemple, lors des semis, on va poser de nombreuses questions : quelle taille de sacs ? Comment les manipuler ? En hauteur ou plus bas ? Motteuse ou pas ? Va-t-on lever le sac ou pas ?

Pour démarrer la liste, nous proposons de veiller à « utiliser ses hanches pour protéger ses lombaires » (aspect que nous expliquerons pendant la formation) mais nous laissons plusieurs cases en-dessous ; ces cases n’attendent que vos suggestions, aussi je vous laisse la main : à vous de jouer pour remplir ce tableau, peut-être trouverez-vous des ingrédients semblables à ceux de vos collègues, ou bien une excellente idée à laquelle personne n’avait pensé. De notre côté, nous amènerons d’autres propositions au moment de la formation et nous pourrons partager tous ensemble. Bon remplissage !

Un tableau pour démarrer